Le parfum au jardin
Petites remarques préalables :
Parler des parfums n’est pas une mince affaire, surtout quand on n’est pas un “nez”… loin de là .
Je ne suis pas un “nez” (pour moi, une fleur sent bon, très bon ou ne sent rien… mais ne m’en demandez pas beaucoup plus !). En préparant ce texte je me suis aperçu qu’il doit y avoir des nez très différents ! Car, dans un ouvrage, une plante qui sent l’Œillet, dans un autre sent le Jasmin ! Les indications données pour les parfums dans les tableaux de plantes sont donc écrites avec des réserves.
J’ai rencontré une autre grosse difficulté : le choix des plantes à sélectionner. Je n’ai gardé que les plantes qui me semblaient vraiment très parfumées.
Mon choix prête donc à critiques.
- Choisya ternata
Un petit historique du rôle des parfums
Les premières traces de l’usage des plantes odorantes remontent à la préhistoire (utilisation d’encens). Mais dès l’antiquité, les plantes à parfum ont joué un rôle important dans quatre domaines
la religion : la fleur d’Oranger, l’eau de Rose, le Romarin, la Sauge, le Basilic (et bien d’autres) ont été considérés très longtemps (pour certains encore aujourd’hui) comme sacrés. Mais les plantes odorantes sont souvent liées aussi à la magie et la superstition (on les utilisait pour s’allier les dieux et repousser les esprits malins),
la médecine : on a prêté de tout temps à certaines plantes, en raison de leur parfum, des vertus curatives. Beaucoup relèvent plus du folklore que de la médecine !
la cosmétique : dès l’Antiquité, les parfums ont joué un rôle important pour l’hygiène et la beauté. Une façon de masquer les odeurs corporelles ! La chimie a permis de créer des parfums artificiels,
la cuisine.
Qu’est-ce qu’un parfum ?
Des molécules chimiques aux jolis noms de terpènes, cétones, aldhéhydes, esters, phénols… des oxydes, des alcools, des composés sulfurés etc. Ils constituent les huiles essentielles, les essences végétales et les huiles et essences aromatiques.
On compte actuellement plus de 30000 molécules odorantes. C’est par les poils ou par des glandes situées à la surface des feuilles, des fleurs ou des écorces que les parfums se libèrent.
C’est au début du XIXe siècle que la chimie a permis d’isoler les constituants des parfums végétaux pour créer des parfums artificiels commercialisés dans les produits cosmétiques.
Le sens de l’odorat chez l’homme est beaucoup moins développé et précis que celui de certains animaux (chien, requin…)
De plus, il varie d’une personne à une autre. Si un “nez” peut distinguer 3500 odeurs différentes, un fumeur n’en repèrera que très peu. Avec l’âge, l’odorat évolue : c’est après la vingtaine qu’il est le plus développé mais, plus on vieillit, plus il est souvent lié à des souvenirs parfois lointains. Quand j’ai commencé à jardiner, je me suis aperçu que j’étais très sensible à certaines odeurs (Å’illet, Lavande, Troène…) : les odeurs du jardin de mon grand-père ! Par la suite, ces réminiscences de parfums ont disparu ou plutôt j’y ai prêté moins d’importance.
La perception de certaines odeurs est très subjective : pour certaines personnes, une odeur peut-être très agréable, pour d’autres elle peut être perçue comme une agression.
Et pour compliquer encore un peu plus, il faut savoir qu’une plante est plus ou moins parfumée suivant :
l’exposition : le parfum se diffuse davantage au soleil et dans les endroits chauds. Mais il se volatilise beaucoup plus vite, si bien que par canicule, une plante peut perdre totalement son parfum.
La direction du vent est importante : il est préférable de planter dans le sens du vent dominant (en Bretagne, l’exposition “ouest” est à conseiller).
la nature du sol : ce n’est pas par hasard que Grasse est devenue la capitale des parfumeurs.
le climat : par temps chaud et orageux les parfums se dispersent plus vite.
le moment de la journée : les meilleurs moments sont le matin et la fin d’après-midi, c’est-à -dire aux moments les plus frais. Si le Jasmin est plus parfumé le matin, le Chèvrefeuille l’est le soir. C’est le soir que les parfums sont les plus envoûtants.
Pour qualifier les parfums, on utilise certains termes (comme on en utilise pour différentier les saveurs des vins !) : floral, sucré, capiteux, entêtant, musqué, poivré, piquant, putride, suave, léger, raffiné, délicat, voluptueux, etc.
Mais on utilise aussi des comparaisons avec des odeurs plus connues (notamment celles des fruits). Ainsi on parlera d’odeur d’amande (Abeliophyllum distichum…), d’anis (Zenobia pulverulenta…), de miel (Sarcococca hookeriana…), de caramel (Cercidiphyllum japonicum), de poivre (Vitex agnus-castus), d’Oranger (Pittosporum tobira…), etc.
les fleurs parfumées le jour perdent leur parfum la nuit alors que celles qui sont parfumées la nuit ne sentent rien le jour (Nicotiana affinis, Hesperis matronalis ou “Belle de nuit”)
On a remarqué que les fleurs blanches ou rouges sont les plus parfumées mais les fleurs orange sont généralement peu odorantes.
- Viburnum carlesii
- Rose ‘Alchymist’
De l’intérêt des parfums ?
Si les plantes sont parfumées, ce n’est pas pour charmer le jardinier mais pour attirer les insectes pollinisateurs. Les parfums ont donc un rôle essentiel dans la reproduction des plantes.
L’insecte, en passant de plante en plante, récupère le pollen des étamines d’une fleur pour le déposer sur le pistil d’une autre. Mais n’importe quelle plante n’attire pas n’importe quel insecte. C’est le soir que le Chèvrefeuille a son parfum le plus puissant… il peut ainsi attirer les papillons nocturnes.
Une question : qui vous dit qu’une fleur inodore pour vous n’émet pas un parfum enivrant pour un insecte ?
Parfum et botanique
Parmi les familles de plantes où l’on trouve le plus de plantes parfumées, il faut noter les Caprifoliacées (Chèvrefeuille…), les Labiacées (Sauge, Menthe…), les Liliacées (Lis, Ornithogale…), les Géraniacées (Géranium…), les Solanacées (Datura…), les Oléacées (Jasmin…), les Rosacées, etc.
Dans le nom botanique de certaines plantes, il apparaît certains termes qui indiquent que la plante est parfumée. Ainsi :
fragrans (Viburnum fragrans) et fragrantissima (Lonicera fragrantissima) : odeur suave,
odoratus, odorus, odorata (Daphne odorata), odoriferus, suavolens, aromatica,
mais aussi foetidus (Helleborus foetidus) : odeur fétide.
Créer un jardin parfumé demande quelques précautions à respecter. Ce qui est souvent loin d’être simple ! Comme pour harmoniser les couleurs, cela peut vite devenir un vrai casse-tête.
Attention aux mélanges de parfums. On évitera de planter trop proches des arbres et arbustes parfumés qui fleurissent en même temps.
Éviter :
les mélanges de plusieurs parfums forts. Ils se neutralisent et le résultat peut être catastrophique.
de mettre côte-à -côte un parfum puissant et un parfum léger. Le deuxième passera inaperçu.
les parfums entêtants (Troène, Chèvrefeuille…) en été, près des fenêtres ouvertes (de chambre par exemple). Risques : maux de tête, insectes.
près des lieux de passage : le long des allées, des bordures de plates-bandes, des terrasses, des escaliers, des entrées dans la maison, des lieux de repos, etc.
Il est très désagréable, voire ridicule, de traverser une plate-bande pour aller sentir une fleur !
aux endroits capteurs de soleil. C’est primordial pour mettre en valeur les parfums d’hiver.
aux endroits confinés et abrités.
Un coin de jardin ensoleillé entouré d’un mur ou d’une haie est l’endroit idéal. C’est particulièrement intéressant pour les parfums légers.
- Osmanthus x burkwoodii
- Philadelphus
- (Seringat)
Alain, le 16 octobre 2010.